• Abbaye Sainte Claire

     

    Décidément, les hommes et les femmes d' église causaient bien des tourments à nos ascendants.

    Après les chevaliers de la commanderie de St Jean, ce sont les sœurs de l'abbaye royale de Sainte Claire d' Annonay qui viennent les importuner.

     

    Abbaye Sainte ClaireLes clarisses s'installent à Annonay au XIII ème siècle. Le couvent, la chapelle sont plusieurs fois détruits, reconstruits. Le couvent est définitivement démoli en 1912.

     

    L'ordre des Pauvres dames, fondé par Sainte Claire, disciple de St François d'Assise, avait une règle très stricte : moniales cloitrées, pas de propriétés privées ou collectives. Mais,  à l'époque qui nous  intéresse,  certaines clarisses  ont  adopté une règle adoucie,  et les sœurs  pouvaient  posséder des biens et toucher des revenus, revenus que Soeur Thérèse de Belmet, abbesse d' Annonay, entend bien encaisser.

     

    9 juin 1767

     

    Abbaye Sainte Claire

     

    Abbaye Sainte Claire

    Abbaye Sainte Claire

    Abbaye Sainte Claire

    Abbaye Sainte Claire

    Abbaye Sainte Claire

    Abbaye Sainte Claire

    Abbaye Sainte Claire

     

    Après quelques pages en latin francisé, Antoine Fraisse, notaire royal, rédige l'acte en français. A la demande de Soeur Thérèse de Belmet, Etienne Paret est assigné à paraître dans les 8 jours par devant les magistrats et officiers du bailliage de Bourg Argental « aux fins de se voir condamner à passer nouvelle reconnaissance en faveur de ladite dame abbesse ». Le conflit vient de terres inscrites au terrier renaudy, le 21 fevrier1489. Les terriers sont des recueils d'actes, ou reconnaissances, passés par des « tenanciers » auprès d' un seigneur, ou dans le cas qui nous intéresse, d'une abbesse. Le tenancier s'engage à verser une rente en échange de l'exploitation d'un terrain dont il est possesseur à titre précaire. L'acte est enregistré chez un notaire, et la reconnaissance implique l' identification précise de la parcelle : nature, superficie, limites. Cette coutume était extrêmement impopulaire auprès des exploitants des terres, qui, visiblement, n'étaient pas particulièrement ponctuels dans le versement de la rente. Ainsi, les Paret ont un arriéré de plus de 28 ans. Soeur Thérèse intervient et entend reprendre la situation en mains. Elle exige une nouvelle reconnaissance des terres, avec inscription au terrier de l' abbaye, aux frais d'Etienne . Il s'agit de pré et de vigne, d'une superficie de 6 bicherées, la bicherée étant la surface que l'on peut ensemencer avec un bichet de graines. Les terres sont délimitées en nommant les parcelles voisines, les ruisseaux, les chemins.

    Elle exige également qu' Etienne soit condamné à verser 31 livres, 5 sols (sous) et 2 deniers pour 28 ans d' arrérages, plus les intérêts de retard. Il est question aussi de réévaluer la rente. Prudente, l'abbesse se réserve le droit de prendre de nouvelles conclusions, et il est hautement probable que d'autres habitants de Limonne puissent bientôt être victimes de sa persévérance.

     

    Quelques mois plus tard, le 4 mars 1768, Etienne riposte.

    Abbaye Sainte Claire

    Abbaye Sainte Claire

    Abbaye Sainte Claire

    Abbaye Sainte Claire

    Après un résumé des griefs de l'abbesse, le « deffendeur » repond que la copie de l'acte du 21 fevrier 1489 n'est pas « revetu de la formalité du sceau » , et qu'il « ne fournit pas une instruction suffisante ». Il demande donc que d'autres actes que le terrier renaudy lui soit remis dans un délai d'un mois, pour qu'il puisse organiser sa défense ou faire d'autres offres.

    Un peu plus d'un an près, le 20 juin 1769, le jugement est rendu

    Abbaye Sainte Claire

    Abbaye Sainte Claire

    Abbaye Sainte Claire

     

    Joseph Camille de Serres de Louis, chevalier marquis de Gras, seigneur de la Baume, bailli général du haut et bas Vivarais et Valentinois, rend son jugement : Etienne Paret, meunier, Claude Boucher, vigneron donataire de Jacques Jacquenel, Jean François, vigneron, François Tranchand, vigneron, tous habitants au lieu de Limonne sont condamnés solidairement à passer une nouvelle reconnaissance en faveur de l' abbesse, et à financer son inscription au terrier. Les nouvelles possessions de l'abbesse sont longuement décrites. En outre, les condamnés doivent payer les 29 années d'arrérage, ainsi que la rente réévaluée.

     

    Comme le laissait entendre l'acte du 9 juin 1767, Etienne n'est plus le seul mis en cause, et des voisins de Limonne le rejoignent sur le bans des accusés.

    Ce n'est plus le bailli de Saint Appolinaire qui gère cette épineuse affaire, mais celui d'Annonay.

     

    Apparemment, l' application du jugement n' a pas été immédiate, puisque 9 ans après, un huissier prénommé Jean, mais dont le nom n'est pas lisible, immatriculé au bailliage d' Annonay, est obligé d'intervenir. L'abbesse est maintenant Marianne Laroche Deperrins, et elle s'adresse à Jean François Tavier Frachon, procureur au bailliage d'Annonay pour que la sentence soit exécutée. Dans le cas contraire, Etienne Paret, meunier, Claude Boucher, vigneron donataire de Jacques Jacquenel, Jean François, vigneron, François Tranchand, vigneron, verront leurs biens saisis. L'huissier précise que les condamnés ne peuvent pas ignorer la sentence et les conséquences à venir « je leur ai baille et laisse au chacun coppie de la sentence et de mon present exploit en leur portant. ». Cet exploit est daté du 9 juin 1778.

     

    Le lendemain, le 10 juin 1778, une note est rédigée par Fourney

    Abbaye Sainte Claire

    Monsieur Fraisse

    J' engage les assignes a vous

    aller trouver avec tous les

    interesses pour reconnaître

    conformement a la sentence

    cy incluse, il est juste que

    que les frais pour defense soient

    payés mais je vous serais

    obligé si vous vouliez bien

    vous interesser pour les moderer

    un peu et les rendre reverscibles

    pour quelque chose sur tous

    les tenanciers qui voudraient

    en meme leur faire bien

    division pour leur quotte part

    de tenancier ou autrement

    de communaute

    je vous prie de m'excuser si

    je ne vous ecrit qu'en note

    et de ne pas moins recevoir

    avec consideration votre

    tres humble et obeissant

    serviteur Fourney

    maclas 10 juin 1778

     

    Nous ne connaitrons pas la fin de l'histoire... Une décennie après, la révolution balaie les droits féodaux et clergicaux, et marque la fin des terriers , ancêtres du cadastre, mais ancêtres pas très fiables, sujets à caution et qui étaient  remis à jour après les successions. Des milliers de terriers ont été brulés dans les années 1789-1792. Le 2 novembre 1789, les biens du clergé sont nationalisés. Un bureau du cadastre est créé en 1791, il fermera en 1801. La loi du 15 septembre 1807 donne naissance au cadastre « napoléonien » .

     

     


  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :